Le concept de cité-jardins

À la fin du XIXème siècle, dans un contexte de révolution industrielle et d’expansion incontrôlée des villes comme Londres, l’autodidacte anglais Ebenezer Howard (1850-1928) cherche à concevoir un modèle urbanistique combinant les avantages de la ville avec ceux de la campagne.
Il théorise sa pensée dans un ouvrage fondateur publié en 1898 : To-morrow : a peacefull path of real reform (Demain : une voie pacifique vers une vraie réforme), réédité en 1902 sous le titre Garden cities of tomorrow. La cité-jardins se présente comme une alternative inédite à l’entassement des ouvriers dans des taudis, tout comme aux villages désertés.

« Villes et Campagne doivent s’épouser et de cette heureuse union jaillira un nouvel espoir, une vie nouvelle, une nouvelle civilisation. »

Ebenezer Howard, Les cités-jardins de demain (introduction de l’auteur).

Dès 1903, l’idée de Howard devient réalité avec le concours de Letchworth, à 50 km de Londres, où Raymond Unwin et Barry Parker conçoivent une cité-jardin, habitée par Howard lui-même l’année suivante. En 1919, Howard crée une seconde cité-jardin, Welwyn, dans laquelle il s’installera en 1921 jusqu’à la fin de sa vie.
La création, en 1899, de la Garden city association s’accompagne d’une diffusion internationale du concept de cité-jardin, grâce à divers courants de pensée véhiculant les mêmes idées sociales, et suscitant de multiples expérimentations. Le concept de cité-jardin reçoit ainsi un écho qui dépasse rapidement les frontières de l’Angleterre et même de l’Europe pour donner lieu à de nombreuses interprétations différentes à travers le monde (France, Allemagne, Autriche, Hongrie, Belgique, Pays-Bas, Espagne, Italie, Etats-Unis, Canada, Australie…).

Les cités-jardins ont « invariablement donné naissance en Europe et en Amérique à des lieux accueillant les classes populaires qui y résident sur le long terme »

Stephen WARD.

En France, c’est le Musée social qui promeut cette idée nouvelle. Fondation privée réunissant réformateurs et libéraux, le Musée s’intéresse à tout ce qui concerne « l’économie sociale ». Il réunit des personnalités comme Jules Siegfried, Léon Say, Emile Cheysson, Henri Sellier… Dès 1903, le Musée social envoie un émissaire en Grande-Bretagne : Georges Benoît-Lévy qui publiera à son retour, en 1904, l’ouvrage La Cité-jardin. La même année naît l’Association des cités-jardins de France. Si l’idée de la cité-jardin remporte un vif succès, sa concrétisation demandera quelques années supplémentaires.

Les cités-jardins françaises ne correspondent pas exactement au modèle imaginé par Howard. Ainsi en France, la cité-jardin se caractérise essentiellement par un ensemble de logements sociaux (individuels ou collectifs, locatifs ou en accession à la propriété) destinés à une population modeste avec des aménagements paysagers et des jardins autour de l’habitat. Voies hiérarchisées, clos, places et mail structurés par la végétation dessinent les bases d’une composition efficace et suffisamment souples pour être réinterprétés à chaque chantier. Enfin, la cité-jardin comprend, dans la plupart des cas, des équipements collectifs (école, crèche, commerces, dispensaire, bains-douches, maison commune, voire église). Majoritairement édifiés par des bailleurs sociaux (offices publics, sociétés anonymes et coopératives), mais aussi par des compagnies de chemin de fer et des sociétés privées, elles proposent par conséquent, des logements populaires, sociaux ou patronaux pour l’essentiel.